Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Histoires de chiens
24 octobre 2017

" LES YEUX DU COEUR "

Chien Journal Le Parisien

Il y a quelques jours, j’ai décidé de ranger quelques affaires dans mon grenier. Des objets étaient emballés depuis une éternité dans du papier journal. Par curiosité, je regarde la date et je tombe sur une feuille du Parisien date du 16 mars 1976. Et que vois-je en tout premier ? Une photo représentant un enfant et un chien, un berger allemand.

 

 « LES YEUX DU CŒUR »

L’EMOUVANTE AMITIE DE DEUX INFIRMES :

L’ENFANT ET LE CHIEN

Nous sommes en 1946, dans un village de Vercors. Karim est un gentil garçon d’une douzaine d’années, dont le regard un peu sauvage est souvent voilé par une profonde tristesse : son père est mort au maquis et lui-même, victime d’un choc nerveux au cours d’un bombardement, a perdu l’usage d’un bras et une jambe.

Dans la forêt, à la limite du territoire des hommes, un autre infirme vit difficilement une vie sauvage, pleine d’embûches que son flair et son instinct lui font déjouer, c’est « Schupo », le berger allemand, abandonné, blessé 2 ans plus tôt par son maître SS.

« Schupo » est connu et redouté des habitants du village et le « chien fou », c’est ainsi qu’on le nomme, alimente les conversations, le soir, autour des tables familiales. Karim, lui aussi un peu « chien perdu », ressent affectivement la solitude de Schupo et comprend son malheur. Mais laissons Jean-Louis Cotte rapporter la scène où, pour la première fois, Schupo acceptera la présence et la caresse de l’enfant.

« Depuis le retour des beaux jours, Karim a pris l’habitude de rendre chaque soir en forêt afin d’y nourrir le « chien fou ». A peine atteint-il les premiers sapins immobiles et sombres dans la splendeur dorée des crépuscules de montagne, que Schupo a, de très loin, deviné son approche. Karim sifflote, s’assied, se met à parler doucement avec son infinie patience d’infirme. Il sait que l’animal est là.

Ces gestes calmes, cette voix humaine à la fois monocorde et paisible, cette présence répétée et étrangement rassurante, troublent Schupo et l’attirent invinciblement. Un soir, enfin, il se décide à l’approcher. Karim qui a entendu le pas léger à travers les fougères, murmure :

-      Schupo, mon chien, je voudrais que tu sois mon ami… Le chien s’enhardit jusqu’à oublier de maintenir entre lui et l’enfant la traditionnelle « distance de fuite ».

Il se rapproche encore et vient flairer les genoux de Karim. Lentement, tout en continuant de parler, l’enfant infirme étend sa main valide. L’espace d’une seconde, il ressent sous ses doigts le dur pelage de l’animal qui, très vite, se crispe mais reste sur place. Karim insiste avec patience et douceur :

-      N’aie pas peur Schupo, j’ai besoin de toi autant que toi-même tu as besoin de moi. 

Le soir vient enfin où il se couche aux pieds de l’enfant, où sa rude tête s’abandonne à la douce, désormais indispensable caresse humaine. Eperdument, son regard fixe celui de l’enfant qui lui sourit. En cet instant unique le pacte ancestral entre l’homme et la bête vient de reprendre ». 

Mais les histoires de hommes ne ressemblent jamais tout à fait aux contes de fées.

Un jour, le grand Gustave, fier-à-bras du village, vainqueur, comme toujours, du concours des chiens de troupeaux, fête son triomphe, au guidon d’une terrifiante moto. Ivre de vin et d’orgueil, il lance son engin à toute vitesse et ne peut éviter Schupo. Karim se précipite pour secourir son ami, inerte, qui gémit doucement. Schupo guérira, entouré des soins de tous ceux qui sont devenus ses amis. Il guérira, certes, mais il restera aveugle.

Karim surmonte, une fois encore, sa peine, quand il se rend compte que, malgré sa cécité, Schupo est heureux désormais, entouré de l’affection de tout le village et surtout de la vigilante présence de son jeune maître. Et puis, la puissance de l’instinct est telle que Schupo, privé d’yeux, a encore développé son merveilleux flair, en compensation de son infirmité. Un jour, lui aussi, aidé par un de ses congénères, il apprend malgré sa cécité à garder le troupeau : les yeux du cœur ont remplacé les autres !

Un beau titre, une belle histoire, un beau film.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité